Rentabilité

Choisir son expert comptable : guide complet

Introduction

Selon une étude IPSOS pour Pennylane en 2021, 76% des dirigeants de TPE-PME sont satisfaits de leur expert-comptable. En 2022, Xerfi nous apprend dans une étude plus documentée que 60% des dirigeants sont très satisfaits et 35% assez satisfaits. De mon expérience terrain, je constate qu’à la manière des assurances dont on se satisfait ou non en cas de sinistre, les experts-comptables sont rarement jugés sur le contrat au quotidien mais sur leur disponibilité et leur réponse en cas de problème.

Le rôle de l’expert-comptable

Avant de comprendre les différences entre certains cabinets, revenons-en aux bases. Le rôle premier d’un cabinet comptable sollicité par une entreprise quelle qu’elle soit est de… tenir la comptabilité de l’entreprise cliente.

Tenir la comptabilité

En effet, sans rentrer dans le détail des obligations de chaque entreprise selon son statut, l’État Français impose aux dirigeants “établir une comptabilité régulière et sincère”. Concrètement, cela se manifeste pour la plupart des entrepreneurs par l’établissement des comptes annuels composé principalement :

  • d’un bilan - qui mesure ce que l’entreprise possède (actifs) et la manière dont elle les “paye” (passifs) ;
  • d’un compte de résultat - qui rend compte de la performance économique de l’entreprise sur une période donnée (1 an la plupart du temps) ;
  • d’une annexe - complétant le bilan et le compte de résultat afin de tenir compte d’éventuelles observations.

Pour être constitués, ces comptes annuels s’appuient principalement sur deux documents :

  • Les journaux de comptes - qui tiennent compte chronologiquement des opérations par famille (Banque, factures d’achats, factures de vente, …) ;
  • Le grand livre - qui tient compte des mêmes opérations par numéro de compte (tels qu’ils sont définis par le Plan Comptable Général).

Attention, je ne mentionne pas ici les diverses obligations comptables spécifiques de chaque type d’entreprise pour ne pas alourdir le propos.

Des prestations supplémentaires au quotidien

En plus de la tenue des comptes, l’expert-comptable propose souvent un “package” complet de prestations composé, dans le détail :

  • Des différentes déclarations fiscales (TVA, CFE, CVAE…) et de leurs mises en paiement ;
  • Des déclarations sociales (bulletins de paie, DSN, …) ;
  • Du bon suivi juridique (Assemblées générales, approbation des comptes, …).

Ces différentes prestations, extrêmement claires dans la tête des experts-comptables et des collaborateurs des cabinets, sont pourtant souvent mal comprises par les dirigeants car elles sont en réalité toutes bien distinctes et pourraient (je ne conseille pas de le faire) être confiées séparément à des prestataires distincts dans l’absolu.

Des prestations ponctuelles et du conseil

Enfin, je ne peux pas finir un paragraphe sur le rôle de l’expert-comptable sans parler des prestations ponctuelles et de conseil. Pêle-mêle, en voici quelques-unes :

  • Assistance en cas de contrôle fiscal, contrôle URSSAF ;
  • Étude sociale (mise en place de titres-restaurants, choix de convention collective, …) ;
  • Valorisation d’entreprise (pour vendre votre entreprise ou intégrer des investisseurs) ;
  • Immatriculation d’entreprise (rédaction des statuts, envoi au greffe, …)

Quel monopole pour l’expert-comptable ?

L’expertise comptable est un métier dit “monopolistique” car n’importe qui ne peut pas l’exercer en France.

Selon la loi française :

Est expert comptable ou réviseur comptable au sens de la présente ordonnance celui qui fait profession habituelle de réviser et d'apprécier les comptabilités des entreprises et organismes auxquels il n'est pas lié par un contrat de travail. Il est également habilité à attester la régularité et la sincérité des bilans et des comptes de résultats.
L'expert-comptable fait aussi profession de tenir, centraliser, ouvrir, arrêter, surveiller, redresser et consolider les comptabilités des entreprises et organismes auxquels il n'est pas lié par un contrat de travail.

Seul un expert-comptable est donc habilité à établir des comptes annuels en étant pas salarié de l’entreprise. Un petit peu plus loin, je parlerai du rôle d’un directeur financier externalisé et de la manière dont cela s’agence avec un cabinet d’expertise-comptable.

“OK Pier-Thibaud mais donc… C’est obligatoire d’avoir un expert-comptable ?

Contrairement aux idées reçues… Absolument pas. L’entreprise (via son dirigeant) est obligée de transmettre aux services de l’État (je reste volontairement large) des documents fiscaux et comptables respectant une certaine norme. Cette norme étant particulièrement rigoureuse et nécessitant un savoir-faire, c’est pour cela qu’une immense majorité d’entreprises font appel - à raison - aux services d’un expert-comptable.

Comptabilité de trésorerie, Comptabilité d’engagement ?

Maintenant que l’on a vu les missions de l’expert-comptable dans le détail, on va faire un focus sur la tenue de la comptabilité.

Par tenue de la comptabilité, on entend ici le travail tout au long de l’année qui consiste à suivre les encaissements, les décaissements, les factures, … La vie de l’entreprise.

Au moment de comparer différentes offres de cabinet d’expertise comptable, vous vous êtes déjà probablement demandé comment certaines plateformes en ligne pouvaient proposer des tarifs à partir de 50€ / mois quand un cabinet avec pignon vous propose, semble-t-il la même prestation, à 500€ / mois.

En réalité, la plupart du temps les plateformes en ligne vous proposent ce que l’on appelle une “comptabilité de trésorerie” tandis que les cabinets “traditionnels” vous proposent une “comptabilité d’engagement”.

Attention, je dis bien “la plupart du temps” car certains cabinets traditionnels ont créé des offres de comptabilité de trésorerie, tandis que certaines plateformes commencent à créer des offres de comptabilité d’engagement.

What’s the difference ?

Pour faire simple, la comptabilité de trésorerie va suivre vos mouvements bancaires (les transactions) pendant que la comptabilité d’engagement va suivre vos pièces (factures d’achats et de ventes, principalement).

Techniquement, on dit que la comptabilité de trésorerie enregistre les opérations lorsqu’elles sont effectives (payées / créditées) tandis que la comptabilité d’engagement enregistre les opérations dès qu’elles sont engagées (d’où le nom de comptabilité d’engagement…).

Wait, what ? Mon comptable ne se base pas sur ma banque pour ma compta ?

Non. Du moins, pas directement. Si vous êtes en comptabilité d’engagement, votre comptable se concentre d’abord sur le suivi des pièces pour chaque fournisseur. Les mouvements bancaires (vos transactions) l’aident à faire des rapprochements et à consolider sa comptabilité. Les comptes bancaires lui permettent également de savoir si vous avez oublié de lui envoyer une facture grâce au compte d’attente.

On va faire un petit focus sur chacun des deux fonctionnements pour mieux les comprendre et dessiner les avantages, les inconvénients.

Vous vous rappelez des journaux de compte dont on a parlé plus haut ? Ils vont trouver toute leur importance ici.

Comptabilité d’engagement

Il serait difficile pour moi de dire du mal de la comptabilité d’engagement. Certes plus complexe, elle permet néanmoins - lorsqu’elle est bien suivie - d’avoir une vue complète de la santé financière de l’entreprise à chaque instant.

Concrètement, pourquoi est-ce que cette comptabilité nous donne une meilleure vue ? Parce que les opérations sont suivies et affectées dans des comptes fournisseurs (qui n’existent pas en comptabilité de trésorerie, on en parle après).

Deux exemples pour mieux comprendre :

  • J’ai une transaction sur mon compte bancaire de “Paypal ****” que je n’arrive pas à identifier. Elle est enregistrée dans mes comptes et on l’affecte au “compte d’attente” (le 471 ❤️) en attendant de savoir à quel fournisseur elle appartient en récupérant la facture correspondante.
  • J’ai une facture d’un artisan que je n’ai pas encore payé. Je l’enregistre dans ma comptabilité, à la fois dans mes comptes de charges (les comptes 6) et dans le compte fournisseur de cet artisan.
    (Plus tard, lors du paiement que l’on constate via votre compte bancaire, on va affecter ce paiement dans le compte fournisseur de l’artisan également et magie, le compte est “soldée” - ie on a autant d’euros facturés que payés)

En quoi cela nous aide, me direz-vous ?

Et bien tout simplement, je peux exporter votre comptabilité (via le grand livre) à n’importe quel moment, j’ai accès à :

  • Vos factures manquantes / transactions non identifiées ;
  • Vos dettes fournisseurs - les factures que vous n’avez pas encore payées ;
  • Vos créances clients - les factures que vos clients ne vous ont pas réglées.

Et cette vue d’ensemble, complète, nous permet de dresser un compte de résultat provisoire très précisément puisque nous avons l’état des dettes et des créances à chaque instant.

“Moi je pensais qu’il fallait envoyer les factures au comptable seulement quand je les avais payées ? “

Comme énormément de dirigeants, c’est l’erreur la plus courante que je constate au quotidien. Pour bien tenir, bien suivre sa compta d’engagement il est fondamental de transmettre les factures dès qu’elles arrivent en comptabilité. Cela allège considérablement les travaux de clôture en fin d’exercice (si si vous savez, quand votre comptable vous envoie un fichier Excel avec 250 factures manquantes et des factures dont il ne trouve pas le paiement).

Comptabilité de trésorerie

On a vu que, côté engagement, on enregistre les opérations quand elles sont engagées peu importe qu’elles aient été payées ou non.

Côté comptabilité de trésorerie, les opérations sont comptabilisées quand elles sont réalisées, payées effectivement. Concrètement, on se base donc sur le compte bancaire pour établir la comptabilité et non plus sur les pièces (factures) reçues.

Les factures de vente et les factures d’achat ne sont donc pas suivies, comptabilisées, tant qu’elles ne sont pas effectivement réglées. Les tiers (fournisseurs, clients, …) quant à eux sont suivis dans des comptes agglomérés et non pas dédiés à chacun d’entre eux (précision technique ici, rien n’empêche techniquement de le faire, j’ai simplement constaté que la plupart des acteurs de la comptabilité de trésorerie ne le font pas).

Une fois par an, à la clôture de l’exercice, on liste les dettes fournisseurs et les créances clients afin d’obtenir une vue complète, sincère, des comptes de l’entreprise.

Attention, seulement certaines entreprises sont éligibles à la comptabilité de trésorerie (conditions de CA selon l’activité). Afin de garantir des informations à jour, voici le lien.

Pour faire simple, si vous avez un CA supérieur à 818 k€ dans le commerce et 247 k€ dans le service, vous n’êtes pas éligible à la comptabilité de trésorerie.

“Ça a l’air quand même beaucoup simple une comptabilité de trésorerie qu’une comptabilité d’engagement, non ?”

Oui, c’est plus simple. C’est la raison majeure qui explique la différence de tarif entre des plateformes qui commencent à 50€ / mois et un cabinet d’expertise comptable traditionnel.

Concrètement, en comptabilité d’engagement, un collaborateur comptable a 3 lignes à saisir pour chaque facture. En comptabilité de trésorerie, la facture est liée à la transaction, la transaction est catégorisée (généralement par le dirigeant) et une seule ligne a donc été saisie (la catégorie sélectionnée pour la transaction).

Comparatif : comptabilité d’engagement vs comptabilité de trésorerie

Fonctionnement

  • Engagement : Se base sur les pièces comptables (factures, avis, …) ;
  • Trésorerie : Se base sur les transactions bancaires

Avantage

  • Engagement : Vue complète en temps réel de l’état financier de l’entreprise
  • Trésorerie : Rapidité de suivi et simplicité

Inconvénient

  • Engagement : Nécessite une bonne synchronisation avec le cabinet comptable
  • Trésorerie : Vue partielle de l’état des comptes, inventaire parfois complexe pendant les clôtures.

Petit commentaire sur ce dernier point, la liste à établir des dettes est souvent piégeuse en comptabilité de trésorerie car il ne faut pas oublier des factures non encore réglées (auquel cas elles seraient comptées sur l’exercice suivant…).

Mes critères de choix d’un expert-comptable

Pour éviter d’embarquer dans un choix de comptabilité qui n’est pas adaptée à votre entreprise, voici quelques critères que je vous propose pour faire votre choix :

  • Complexité de la société / des sociétés : Si vous avez des investisseurs, des prêts complexes, des associés personnes morales, une holding dirigeante, …
  • Alors s’assurer d’une bonne comptabilité en temps réel est souvent nécessaire. La plupart des cabinets traditionnels ayant une offre juridique complémentaire, cela assure souvent un meilleur suivi.
  • Vitesse d’encaissement / Typologie de clients : Si la date de paiement d’une facture est toujours la même que la date d’émission (cas de l’e-commerce par exemple)
  • La comptabilité de trésorerie sera assez simple à suivre pour les encaissements, attention malgré tout à bien suivre vos paiements fournisseurs.
  • Si vous avez une mauvaise connaissance de vos obligations fiscales, de votre régime de TVA, de certaines méthodes de calcul comptables, …
  • Soyez vigilant sur votre choix. Si vous choisissez ou avez choisi la trésorerie, soyez vigilant à la capacité de conseil de la plateforme choisie car en définitive vous êtes responsable en cas de problème.
  • Si vous avez peu de lignes à l’achat, à la vente, que vous êtes seul et que vous connaissez déjà votre CA à l’avance (free-lances en missions longues par exemple)
  • Alors la comptabilité de trésorerie vous apportera la simplicité de gestion et rapidité dans votre suivi administratif.

Évidemment, ces conseils n’étant pas personnalisés, ils n’ont aucunement vocation à remplacer une consultation dédiée avec un professionnel du suivi financier qui pourra vous orienter vers la solution la plus adaptée à vous en tant que dirigeant et à votre entreprise.

Pier-Thibaud Guerrier
Pier-Thibaud Guerrier
co-Fondateur de Penge

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